[Interview] A la découverte de Charlotte & Magon

Le 6 décembre, l’EMB accueillait quatre groupes de la scène locale en soutien au Téléthon. Le duo Charlotte & Magon formé au travers d’une rencontre sur le web, nous a présenté sa pop psychédélique tendre et personnelle. Après avoir sorti deux albums, la chanteuse française et le guitariste israélien sortiront un nouvel EP en 2015, un moyen pour eux de se renouveler et d’être toujours plus libres.

Une petite présentation rapide ?

Charlotte : Et bien, nous sommes Charlotte et Magon, et nous formons un groupe de pop psychédélique.

Pourquoi ce choix de revenir à un EP après avoir sorti deux albums ?

Charlotte : Très bonne question…

Magon : En fait, ce prochain EP a été enregisté dans notre studio. Les deux premiers albums ont été enregistré avec des musiciens dans de grands studios. Pour ce projet, nous voulions avoir plus de contrôle afin d’obtenir un résultat plus personnel et plus intéressant. Quand tu travailles dans ton propre studio, tu as un temps illimité pour tester, essayer plusieurs choses. Il y a aussi des limites, aucun de nous ne fait de la batterie par exemple donc il a fallu trouver un moyen d’enregistrer cette partie nous-mêmes. C’est comme ça qu’on a commencé à travailler, sans savoir si on ferait un album ou un EP. Comme c’est la première fois qu’on fait ça, on a pensé qu’il serait bien de faire déjà un EP puis de s’organiser pour ressortir quelque chose peu de temps après. Au lieu de faire un album tous les deux ans, pourquoi ne pas sortir un EP tous les ans, ou tous les huit mois ? C’est un processus qui peut nous donner satisfaction et nous permettre de sortir plus de choses. C’est en adéquation avec notre nouvelle configuration scénique. C’est nouveau. Comme si on créait un nouveau groupe.

Vous aviez un vrai groupe avant ? Vous n’étiez pas que tous les deux ?

Charlotte : Non. Magon vient d’Israël, moi je suis française, et les premières années, nous étions chacun de notre côté. On avait du mal à se séparer de nos musiciens à Tel-Aviv donc on jouait souvent avec eux. Cette année, on s’est dit « tentons d’être libres ». Pas que les musiciens nous enferment mais on est beaucoup plus autonomes et en fait, ça colle beaucoup plus avec l’esprit de notre nouvelle musique qui est encore plus psychédélique qu’avant, c’est-à-dire qu’elle est plus expérimentale. A deux, c’est plus simple d’aller dans cette direction.

Vous laissez une place à une représentation imagée de votre musique, avec de la photo, de la vidéo. Pourquoi est-ce que c’était important pour vous de créer votre identité aussi de cette manière ?

Charlotte : En fait, c’est venu pendant la construction du projet. Pour notre premier  album, Magon a fait la jaquette tout seul. Pour le deuxième, on s’est dit qu’on voulait faire des films, des vidéos et on a travaillé avec de supers réalisateurs. On a juste adoré ! Magon s’est ensuite énormément intéressé à la photo et maintenant, on ne peut plus s’envisager sans cet univers visuel. On est des fans de films, on aime mélanger les arts.

Magon : C’était important pour nous quand on a commencé. Dans tout processus artistique, que ce soit avec une vidéo ou une image, il faut donner une impulsion. Mais nous sommes musiciens, et nous n’avions pas vraiment le temps de savoir ce que nous voulions. On savait juste ce qu’on ne voulait pas. Mais avec le temps, on a développé notre connaissance technique, avec les vidéos faites pour le dernier album. Nous avons filmé la prochaine vidéo qui va sortir, que tous les deux, et, ce sera probablement la meilleure puisque à nouveau, on a utilisé la liberté qu’on a ensemble. Au lieu d’être limité par un tournage de trois jours seulement par exemple, on a tourné pendant 9 jours tous les deux, et 8 jours de montage…

Charlotte : Quand on le fait comme ça, nous-mêmes, c’est plus expérimental. On peut tester des trucs, prendre du temps, et c’est vraiment dans cette optique de recherche, de laboratoire qu’on aime travailler.

Magon : On travaille aussi avec un photographe, un bon ami à nous.

Est-ce que vous pensez vos chansons en fonction d’images qui vous viennent, ou est-ce que les images sont apposées ensuite ?Charlotte : Ça, c’est une bonne question. Je sais quoi répondre (rires). Disons que quand on a commencé à faire de la musique ensemble, on n’avait pas d’idées précises par rapport à notre identité visuelle mais on voulait faire quelque chose de total. Que chaque aspect - la musique bien entendu, mais aussi notre manière de nous présenter, de nous habiller sur scène - que tout est un sens, et que ça corresponde à l’intention de l’album. Donc très souvent, c’est vrai qu’on commence des chansons en ayant des idées, des envies, des émotions et donc forcement des images, des ambiances. Pour une chanson, on a fait une vidéo dans le désert et on avait pensé ça en composant.

On a une nouvelle chanson qui va sortir sur l’EP qui parle du fait d’être coincé dans un labyrinthe. C’est un peu l’allégorie de la recherche intérieure. Forcement, avec une idée de ce type, il y a des images communes qui viennent mais on ne veut pas faire quelque chose de trop simple donc on a trouvé une idée qui s’assimile à ça et s’en détache.

Vous avez beaucoup joué à Tel-Aviv. Quelle place est donnée là-bas, à des projets comme le vôtre ?

Magon : Depuis que j’ai commencé à faire de la musique, beaucoup de choses ont changé à Tel-Aviv. Au début, il n’y avait pas beaucoup de groupes qui chantaient en anglais ou dans des langues étrangères. Maintenant, ça s’est élargi. Après, en terme d’industrie musicale, il n’y a pas grand chose. Il y a très peu de groupes, surtout populaires, qui peuvent vivre de la vente de leur musique. Mais la ville est très ouverte aux jeunes projets, issus de tous types de musique. C’est plus facile pour Charlotte et moi de jouer à Tel-Aviv. Nous avons plus de fans là-bas ; c’est plus petit donc c’est assez facile de remplir les salles. Aussi, le fait que Charlotte soit une chanteuse française rend notre projet intéressant en Israël. C’est magique, je ne sais pas si c’est pareil vis-à-vis de moi ici (rires). Donc oui, on est toujours très bien accueilli.

Parlons un peu local. Pourquoi avoir eu envie de jouer à l’EMB ?

Charlotte : On avait envie de faire un concert. L’EMB, c’est une salle qui est importante dans le Val d’Oise. Candidater pour ce soir était si simple qu’on a pas hésité. Je n’étais jamais venue, je commence simplement à découvrir ce qui se fait musicalement dans le 95 alors que j’y habite depuis longtemps mais j’étais toujours fourrée à Paris.

Mais ça fait du bien de voir qu’il y a une visibilité donnée aux groupes locaux. C’est bien d’avoir une ambiance différente de Paris, où les salles prennent des risques, qu’il y ait une espèce de dynamique de recherche de nouveaux sons, de nouveaux groupes, surtout grâce au Combo95. C’est très très bien. On se rend compte qu’il y a un petit réseau, des assos qui font des choses.

Dernière question. Ce soir vous jouez pour le Téléthon. Vous aviez déjà soutenu une cause similaire ?

Charlotte : Non, on n’a jamais fait ça. Mais en fait, moi, ça me plait.

Magon : Non, sauf si c’est nous qui payons pour jouer (rires). Charité artistique.

Pourquoi ça te plait Charlotte ?

Charlotte : On se considère comme des gens ouverts sur les autres, féministe, végétarien, pour la paix, anti racisme, tout ça, donc c’est important parfois de donner un peu de soi pour les autres. C’est le but de la musique : rapprocher les gens, adoucir les mœurs. C’est pour ça qu’on est là, il y a un rôle sacré dans la musique qu’on a tendance à oublier, donc c’est important aussi dans la mesure du possible, de faire ce genre de chose, même si on est un groupe en développement.

Interview réalisée par Juliette Savard, initialement posté sur le site de l'EMB de Sannois

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